UKRAINE-RUSSIE - Quand Le Déserteur de Vian se chante en russe. 3 questions à Benjamin Sire aka E-Riser

Par
Yasmina Jaafar
18 octobre 2022

Benjamin Sire aka E-Riser, Géraldine Jay Sroussi, Gilles Clavreul, Mathias Malzieu et Mike Ponton du groupe Dionysos entourent la chanteuse Daria Nelson pour reprendre en langue russe le célèbre titre de Boris Vian, Le déserteur. La vidéo de la chanson est en ligne depuis hier 17h (et à la fin de notre entretien). Son objectif ? Toucher "les populations mobilisées" Russes. Nous avons voulu en savoir plus sur cette signature artistique, politique et humaniste : 

Comment est née l'idée d'adapter la chanson de Boris Vian Le déserteur ? 

L'idée vient d'une discussion informelle avec mon frère. Il a lancé ça en l'air. « Dans le contexte actuel de la mobilisation de Poutine, ce serait tellement pertinent de faire une version russe de Le déserteur de Vian ». Évidence, merci ! J'ai réfléchi une demie seconde et... j'ai dit : « Oui, je m'en occupe ». Sans savoir ce que cela signifiait, sans vraiment penser. Ce qui est souvent le meilleur moyen de faire aboutir les choses. J'ai totalement déserté le monde pendant quinze jours, en dehors du travail pour le journal Franc-Tireur, pour préparer l'arrangement.

Qui a collaboré au projet ? Et quelles ont été les étapes ? 

Je pensais trouver facilement un chanteur ou une chanteuse russe ou ukrainien, ayant quelque connaissance des réseaux ici. Mais la peur a fait son office et ce fut bien plus difficile que je ne le pensais. Alors que j'étais sur le point de renoncer, le miracle a eu lieu grâce à mon ami Gilles Clavreul qui m'a présenté Mathias Malzieu du groupe Dionysos. Or, j'ai toujours été fan du groupe. Un pur coup de feeling humain. Mathias sort un (superbe) album le 22 octobre avec la chanteuse Daria Nelson. Et c'est elle qui a dit banco pour enregistrer. Je me suis chargé de tous les instruments, sauf de la guitare, enregistrée par Mike Ponton, le guitariste de Dionysos, qui a fait ça dans un temps record. Nous nous sommes tous donnés rendez-vous dans mon home studio. Ma compagne, la réalisatrice Géraldine Jay Sroussi, a amené un peu de matériel, tenue la caméra, tandis que Mathias se chargeait de la seconde et, roulez jeunesse. Nous avons fait une seule prise et Daria a fait le reste par sa présence et son interprétation. J'ai monté ça et nous voilà.

Vous musicien, avec cette réalisation, vous agissez ! Est-ce dans vos habitudes et que pensez-vous des "engagements" ici et là des artistes pour dénoncer les conflits mondiaux ?

Je ne suis pas un grand fan de l'engagement des artistes, souvent puéril et facile comme on l'a vu dans l'histoire du soutien aux femmes iraniennes. Ça ne mange pas de pain de se couper un centimètre de cheveux et on assure sa promo avec ça. Ce qu'a fait Daria est autrement courageux. Moi, je le fais avec ma triple casquette de journaliste politique, de citoyen qui a toujours été dans l'engagement et de musicien. Mais d'ordinaire, je me sers justement de la musique pour fuir le difficile contexte de l'actualité. Là, j'ai fait une entorse à tous mes principes, mais je pense que ça vaut le coup, même si j'ignore ce que tout cela donnera. C'est fait, c'est aux gens de voir comment ils prendront la chose. Mais le vrai but, même si rien n'a été défini avant, est que le titre puisse entrer en Russie d'une manière ou d'une autre. Notre cible, nos interlocuteurs souhaités, ce sont les jeunes Russes, qui se voient contraints de s'engager dans un conflit fratricide et inutile. C'est cela qui est important. Après, je laisse aux artistes toute latitude quant à leur engagement, ce n'est vraiment pas mon problème. J'aimerais juste qu'ils soient parfois moins suivistes et qu'ils soient vraiment parfois à l'origine de quelque chose d'utile. C'est rarement le cas.

дезертир, Le déserteur, Русские солдаты, это обращение к вам est disponible sur les réseaux E-Riser : YouTube, Instagram, Twitter etc, depuis le lundi 17 octobre à 17h.

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