"Cette France que j'aime autant que je vous aime" 2007. Jacques Chirac était un homme décidé. En 1994 et 1995, il a montré sa détermination. Édouard Balladur qui devait gagner la future présidentielle ! Mais que ne fut-il pas déçu à l'annonce des résultats le 7 mai 1995.
Chaque dimanche Jacques Chirac recevait des journalistes et des politiques pour annoncer sa victoire future. Ils quittèrent le bureau la main sur la bouche. Elle cachait un rire moqueur et pourtant... L'isolé sera élu !
Il avait raison. Une fougue, une ambition, une énergie fantastique qui détruit tous les pronostics.
Jacques Chirac était un homme convaincu. En 2002, il dit non au Front national. En 2003, il dit non à la guerre en Irak.
En 2019 il s'éteint à l'âge de 86 ans. "C'est mieux comme ça..." dit son amie Line Renaud. Et elle ajoute : "Il aimait son pays plus que tout au monde. Il n'était pas mondain. Juste le contraire. Il aimait les français." Il les connaissait sans sectarisme. Son seul ennemi était le Front national. Il lui a adressé une fin de non-recevoir. Il était ferme et bien plus encore. C'était un animal politique. L'échec était un moteur pour lui. Il était de la race des combattants. Il décimait chacun de ses adversaires sans scrupule. Un tueur-né en politique. Les Guignols au travers de la voix de la marionnette de PPDA lui faisaient manger des pommes durant 2 ans. 2 ans où l'homme ambitieux a dû attendre sereinement la fin de la cohabitation : "mangez des pommes" un slogan qui a su le rendre sympathique le futur président de la République. "Putain, j'ai niqué couille molle" s'écriait sa marionnette. Une caricature tirée du livre qu'il avait publié avec pommier en couverture. Sa popularité fit un bon grâce à ces sketchs.
L'adhésion fut complète en 2003 quand il s'oppose aux États-Unis et décide que la France ne participera pas aux frappes. "C'est à cet instant que Jacques Chirac entre dans l'histoire" indique l'ancien premier ministre François Fillon. Il risque là une rupture d'alliance mais il résiste dans une attitude gaullienne forte. La France est entendue.
Je l'ai rencontré à l'inauguration du Salon du livre alors que je travaillais pour Guillaume Durand. Nous avons échangé quelques mots. Je garde le souvenir de grandeur et chaleur. Il aimait autant la foire agricole que le salon du livre. Un charmeur véritable, un gourmand cultivé, un personnage de fiction trouble, sincère et menteur à la fois. Jacques Chirac était un être complexe qui a su se faire aimer même quand il dissout l'Assemblée nationale... ou qu'il opte pour le quinquennat.
"Il incarnait l'âme de la France" a dit Gérard Larcher le président du Sénat. À mon sens, il incarnait aussi son union. Se souvenir fait du bien dans une France qui se segmente et se communautarise.
Jacques Chirac était homme poli et rude, courtois et direct. Il était un homme d'un autre monde presque ancien. Cette fois, oui nous entrons de plain-pied dans le Nouveau Monde tant souhaité par le président actuel Emmanuel Macron.
"Je peux dire que je voterai Hollande" annonce Jacques Chirac en 2012 l'air de rien. Une amitié semble réelle entre les deux hommes. Ce duo corrézien qui aimait qui aurait dû installer plus de défiance que de sympathie fonctionnait. Ils ont L'ENA en commun : Jacques Chirac de la formation Vauban, François Hollande de la formation Voltaire. Ils ont aussi la détestation de Édouard Balladur en commun... ce sont des gens de contact et pourtant Jacques Chirac restera le dernier président de l'ancien monde, le dernier à faire un septennat, le dernier qui incarne l'unité française. Jacques Chirac disait que c'était que c'était François Mitterrand le dernier grand président...
L'Histoire jugera.
Jacques Chirac était un des premiers à se préoccuper de l'environnement. Souvenons-nous de cette phrase tellement actuelle : "La maison brûle et nous regardons ailleurs". La discours est là mais la charte aussi. Il sera le premier à reconnaître la responsabilité de la France dans la seconde guerre mondiale au travers du discours du Vél' d'Hiv'. Le 16 juillet 1995 marque encore les esprits : "La folie criminelle de l'occupant a été secondé par l'État français".
Le premier à reconnaître que l'esclavage est un crime contre l'humanité. Le 30 janvier 2006, il fera du 10 mai, la journée.... Il dira : "La grandeur d'un pays et d'assumer toute son histoire". Son héritage parmi d'autres est aussi le quai Branly Jacques Chirac. Un lieu qui attire chaque année 1300000 visiteurs par an. Il laisse sa trace par le biais de ce musée qui regroupe tous les arts premiers. Il était érudit, il était bien plus que sa caricature qui le cantonnait à la tête de veau. Ce seul musée suffit à sa postérité contrairement à François Mitterrand qui a mis Paris en travaux durant des lustres pour s'assurer qu'on ne l'oublie jamais. La sécurité routière et la multiplication de radars automatiques contre toute l’opinion publique, les deux premiers lois sur le handicape en 1975 et 2005, le plan cancer en 2003 et 2004 pour le cancer du sein... Toutes ces mesures rappellent que Nicolas Sarkozy se trompait quand il lui a attaché l'étiquette du "Roi fainéant"... Un "roi" qui s'inquiétait des plus faibles surtout.
Jacques Chirac était un homme blessé par son père et par la perte de sa fille. Il dira : "Ça restera comme la tragédie de ma vie"...
Jacques Chirac était un homme énigmatique.
Jacques Chirac aura marqué la France et nos esprits.
L'ancien chef d'État sera inhumé au cimetière du Montparnasse aux côtés de Laurence, sa fille.