Laruchemedia.com était à la conférence de presse : YourArt, c'est quoi ? La place de IA dans l'univers culturel ? Menaces et atouts ? Toutes les réponse grâce à l'entretien croisée entre Laurence Bonicalzi Bridier (CEO) et Stéphane Lévy (VP Product)
Comment définissez-vous YourArt ?
Laurence Bonicalzi Bridier : YourArt, c'est la porte d'entrée vers l'art pour le grand public. Des musées, des galeries et des milliers d'œuvres et des chemins, des guides pour découvrir l'art et les artistes. Mais venir sur YourArt est bien plus qu’une déambulation : c’est profiter d’un espace ouvert à tous ceux, artistes et art lovers, qui veulent montrer ou découvrir des œuvres, enrichir et partager leurs passions, vendre ou acheter un tableau, une sculpture, une photo…
Stéphane Lévy, VP Product : C’est une plateforme pour toutes les communautés du monde de l’art et pour les artistes avant tout, qui peuvent se présenter de façon exhaustive dans leurs espaces personnels.
Votre mission, dites-vous, est de démocratiser l’art par la pédagogie. YourArt est-elle une plateforme d'utilité publique ?
LBB : Oui, bien sûr. Le plus de YourArt, c’est l’ouverture totale. En n’ayant ni sélection, ni jugement à l’entrée, nous accueillons tous les artistes qui souhaitent y exposer, et en proposant au grand public de découvrir l'art sans complexe, nous faisons nous aussi preuve d’utilité publique. Pour certains de ces artistes, c’est une vraie chance - et une grande première - de montrer leur travail. Par ailleurs, YourArt est totalement gratuite pour le public. Elle sert donc à découvrir, à se cultiver, à comprendre et à regarder le monde un peu différemment, à travers l’art.
Quel est le bilan au bout de 10 mois ?
LBB : YourArt a déjà réussi son premier pari : faire venir les artistes et attirer les art lovers et les collectionneurs. Elle compte plus de 2 000 artistes abonnés (40 % d’amateurs et 60 % de professionnels, indépendants ou représentés), près de 7 000 art lovers et art collectors inscrits, et le site a enregistré 450 000 visiteurs uniques depuis le lancement.
Avez-vous des retours des artistes présents sur la plateforme ?
LBB : Ce projet se construit grâce à l'échange avec les artistes. Beaucoup de ces retours concernent la mise en majesté de leurs œuvres sur la plateforme. Les artistes ne pourraient pas concevoir eux-mêmes leurs espaces virtuels et ils ont le sentiment très positif d’avoir le meilleur de ce qui se fait en tech. Ils sont aussi très sensibles à tout ce que nous faisons pour eux. Nous leur transmettons notamment toutes les semaines leurs statistiques, ce qui est important pour eux. Et ils apprécient particulièrement les mises en relation que permet la plateforme et que nous nous efforçons d’organiser, en ligne comme dans la vraie vie.
SL : Le produit avance selon nos intuitions, nos envies et nos ambitions, mais aussi par l’expérience des artistes et évidemment leurs feedbacks, qui sont toujours surprenants et nous font découvrir des choses que nous n’avions pas vues. Un artiste que j’ai rencontré sur un salon n’avait pas compris comment charger ses œuvres sur la plateforme. C’est pour cela qu’on a ajouté sur le site un bouton « + », qui permet d’utiliser facilement le site en tant que créateur de contenu.
À chaque fois que nous déployons une « release », une évolution technique importante de la plateforme, nous essayons de tenir compte de leurs retours de la façon la plus efficace. C’est au cœur de notre stratégie, car nous sommes en développement agile et nous ajustons en permanence nos choix techniques. Même si, bien sûr, tout est une question de temps et de productivité.
En quoi êtes-vous différents des autres plateformes ?
SL : Techniquement, YourArt rassemble toute une série de fonctionnalités et d’outils pertinents, voire indispensables pour les artistes qui veulent montrer leur travail. L’espace personnel est une façon très riche de se présenter, notamment grâce à la vidéo, qu’on ne trouve pas sur les autres plateformes. Nous avons les galeries virtuelles que nous appelons metagalleries, très utiles notamment pour tous les artistes qui ne sont pas représentés par une galerie d’art physique. Nous avons cet aperçu de l’intimité créative et sensible de l’artiste que permet le musée imaginaire. Et tout cela est au même endroit, avec la force de l’IA, qui fait de YourArt un vrai portail sur le monde de l’art.
LBB : Nous sommes la plateforme de nouvelle génération, grâce à l’utilisation de toutes les nouvelles technos, mais nous sommes aussi un média, un réseau social et une marketplace. Aucune des autres plateformes n’a tout ce que vient de décrire Stéphane.
Aller sur YourArt est-il une façon de jouer avec lA ?
SL : L’IA est très présente sur YourArt et elle induit une dimension ludique dans la navigation et dans la façon dont on explore le catalogue, les œuvres et les artistes. Nous utilisons la force de l’IA, qui rapproche les mots des images et les images des images. Et puis l’IA permet de contextualiser les œuvres dans l’histoire de l’art en cherchant des œuvres similaires ou des mouvements artistiques auxquels les œuvres s’apparentent.
La dimension de jeu sous-tend aussi l’interactivité de l’IA. Iris, notre assistant personnel, invite le visiteur à faire deux expériences : le test de sa personnalité artistique et son portrait artistique généré grâce à l’IA et aux LLM. Dans la pratique, Iris nous parle, repère nos traits et nos goûts, puis les analyse avant de faire des recommandations d’œuvres contemporaines présentes sur YourArt
Qui choisit les œuvres pour les tests de personnalité ?
SL : C’est l’IA ! Elle sait piocher au hasard dans les bases de données (nous travaillons avec de très nombreuses sources, d’abord dans le domaine public, ensuite dans des catalogues d’art auxquels nous avons accès contractuellement). La sélection varie selon le type de test : en mode « Premiers pas », toutes les œuvres montrées à l’utilisateur sont connues, parfois extrêmement connues. Dans la version « Initié », Iris propose des artistes plus pointus. Mais, c’est le sel du jeu : on ne sait jamais à l’avance sur quoi on va tomber.
Combien de temps à pris la recherche tech ?
SL : Nous ne nous sommes pas lancés “from scratch”. La recherche qui a conduit à YourArt trouve ses origines dans celles menées depuis plusieurs années chez Weborama par Jonas Botbol, data scientist et ingénieur en deep-learning, et moi, dirigeant le pôle data science de Weborama. Nous avons exploré le domaine de l’IA sémantique : appliquée à la langue, mais aussi aux images et aux vidéos. Ensuite, nous avons adapté ces recherches au domaine de l’art et les avons implémentées sur YourArt.
LBB : Nous avons choisi de tout faire “à la maison", plutôt que de prendre des technos “sur étagère”. Nous ne voulions surtout pas de solutions clés en main, qui ne permettent pas d’avoir un design personnalisé et une maîtrise de la data. Et puis « souveraineté française » n’est pas un vain mot à nos yeux. C’est une véritable volonté.
SL : En général, les départements techniques préfèrent avoir le contrôle de leurs technos, sinon ils ne peuvent pas adapter les programmes à leurs besoins spécifiques. Depuis un an, nos recherches sont réalisées avec des spécialistes de l’apprentissage profond. En fait, chez YourArt, la recherche ne s’arrête jamais et les innovations arrivent tous les mois. Aujourd’hui, nous privilégions l’expérience interactive et créative avec l’IA.
Faut-il avoir peur de l’IA ? Peut-elle « effacer » des métiers dans l’univers de la culture ?
LBB : L’IA propose une expérience que personne d’autre ne peut offrir. C’est grâce à elle que nous allons pouvoir ouvrir au plus grand nombre les portes de l’art, des musées. Et l’IA de YourArt ne va pas effacer des métiers : au contraire, elle leur donne une extension, en proposant de nouvelles expériences.
SL : Dans le domaine de l’art, il y a d’une part l’IA pour l’initiation, l’exploration et la
Tapez pour saisir le texte découverte, d’autre part l’IA pour les artistes et la création. Pour l’instant, nous utilisons surtout l’IA pour l’exploration, qui va se comporter un peu comme un guide ou un curateur. La deuxième est un sujet de plus en plus explosif, en raison du risque que l’IA pourrait faire courir aux artistes et aux métiers de la création. Dans certains métiers, elle va faire gagner en productivité et peut représenter une menace. Et puis il y a le risque que fait courir la construction des modèles : des données sont intégrées dans la phase d'entraînement et la question du pillage des artistes se pose. La question de l’identité et celle du plagiat sont en jeu.
Cependant, on peut aussi voir l’IA comme un stimulateur et certains artistes l’utilisent d’ailleurs comme un formidable outil de brainstorming, un vrai partenaire. Elle les aide à explorer et à créer des images qui peuvent être confondantes de réalisme.
Un mot sur votre concours ?
LLB : Depuis le 25 février et jusqu’au 20 mai, nous présentons chaque week-end 25 œuvres sélectionnées sur la plateforme. Nous mettons donc en avant le travail de 25 artistes. Chaque lundi, l'œuvre la plus plébiscitée est offerte grâce à un tirage au sort à l'un des votants. La participation est en hausse régulière et nous avons eu plus de 5 000 votants sur les 8 premières semaines. À la fin, nous aurons mis en avant le travail de plus de 300 artistes et même créé des occasions de rencontres physiques entre artistes et art lovers, à l’occasion de la remise de l’œuvre. Cette mise en relation entre l’artiste et l’acheteur est complètement dans l’ADN de YourArt. C’est même une de nos missions et ce concours y participe très concrètement.
Laurence Bonicalzi Bridier (CEO) et Stéphane Lévy (VP Product)
Photo YourArt Siouzie Albiach