Coraline Jond : "La solidarité se définit comme une évidence"

Par
Yasmina Jaafar
21 août 2025

Entrepreneure et communicante de formation, avec plus de dix ans d'expérience dans le marketing et l'innovation, Coraline Jond est déterminée à donner un sens nouveau à la solidarité. En 2020, elle invente "d’Avec Eux" ,"au début Pour le sourire d’enfant" dit-elle. Cette initiative est née de ses actions humanitaires personnelles et d'une prise de conscience car en France aussi, la solidarité est essentielle ! Rencontre avec une femme engagée.

Avec Key Insights, mon bureau de tendances et d’innovation, j’ai accompagné des marques dans leur évolution notamment à travers la digitalisation de leurs points de vente (boutique Couvent des Minimes, par exemple) et la mise en place de dispositifs innovants sur leurs évènements (Marathon de Nice, par exemple). L’objectif était d’identifier des opportunités concrètes créatrices de valeur et de les transformer en expériences différenciantes (avec de la reconnaissance faciale, par exemple).

Avec Chipee, ma start‑up, j’ai voulu repenser un modèle saturé – celui de la publicité en ligne. Nous avons proposé une solution inédite : permettre aux internautes de financer leurs frais de livraison simplement en regardant des publicités ciblées. L’idée était de transformer une contrainte subie en un avantage choisi, grâce à un deal plus équitable et positif entre annonceurs et utilisateurs. Ces deux aventures entrepreneuriales, dans la continuité de mon expérience en agence de communication où j’ai évolué de chef de projet à directrice conseil, ont été l’expression naturelle de qui je suis » : observer, ressentir, répondre aux besoins que je perçois, ... Cette sensibilité, alliée à mon exigence de travail et à ma conviction qu’un modèle peut être réinventé lorsqu’il est pensé avec sens, m’a guidée dès le départ.

Avec Eux s’inscrit dans cette même logique, avec une ambition profondément humaniste.  En 2020, au moment où la pandémie m’a contrainte à rester en France (alors que je partais chaque année à l’étranger dans les orphelinats), je me suis rendu compte de l’ampleur du tissu associatif dédié à l’enfance en France. J’ai découvert que, tout près de nous, de nombreuses associations agissent chaque jour pour les enfants en difficulté (1 sur 4), mais qu’elles manquent cruellement de visibilité et de relais. J’ai donc décidé de mettre mon expérience entrepreneuriale et mes compétences en communication au service du projet de ma vie, et inédit : créer la 1ère communauté caritative française qui rend la solidarité locale plus simple, innovante et désirable. Avec Eux agit comme un porte‑voix pour ces associations, en valorisant leurs actions via une série documentaire, une plateforme digitale et des événements qui donnent envie aux citoyens de s’engager à leur échelle.

En somme, le virage n’est pas une rupture mais une continuité : de l’innovation pour les marques, à l’innovation pour la solidarité. Toujours avec la même conviction : croire en ses idées, travailler sans relâche, et mobiliser l’humain pour créer un impact concret et durable.

Pour moi, la solidarité se définit comme une évidence. J’ai grandi dans un petit village où elle se vivait naturellement : on se filait un coup de main, on faisait attention les uns aux autres. C’est quelque chose de simple, presque instinctif : aider, écouter, être là. On associe souvent la solidarité à de grandes causes : des crises sanitaires comme la pandémie, des catastrophes naturelles, ou encore l’héroïsme de ceux qui, comme les Justes, ont risqué leur vie pour sauver des familles. Ces élans collectifs marquent l’histoire et nous rappellent notre capacité à nous dépasser. Très bien. En revanche je pense que la solidarité peut s’inscrire également dans nos vies au quotidien, à travers des gestes plus modestes mais tout aussi essentiels : aider une personne âgée dans la rue, écouter un voisin, tendre la main quand quelqu’un vacille.

À l’échelle de la société, je suis convaincue qu’elle peut nous sauver. Face à l’individualisme grandissant, nous devons réapprendre à penser collectif plutôt que chacun pour soi. Comme l’expliquait Émile Durkheim, la solidarité est le ciment de toute société : autrefois mécanique, basée sur la similitude, elle est aujourd’hui organique, née de notre interdépendance et de la complémentarité de nos rôles. Elle est également un véritable remède à la morosité ambiante, car elle fait du bien à chacun. Elle procure de la joie, de la fierté, et nous aide à devenir une meilleure version de nous-mêmes.

Et d’ailleurs ce n’est pas nouveau. Elle a toujours existé. On l’observe autant chez les animaux, les plantes que chez les humains. De nombreuses études démontrent qu’en période de crise, notre premier réflexe reste de nous entraider. C’est un instinct vital, mais aussi l’une des plus belles preuves d’humanité.

Pour moi, la solidarité n’est donc pas une injonction froide, mais une force vivante, profondément humaine et altruiste. Et c’est cette définition que je mets en application à travers Avec Eux : rendre la solidarité de proximité visible, accessible, évidente pour qu’elle redevienne un réflexe sociétal.

En Europe et dans les pays riches, la solidarité n’est pas absente, mais elle est trop peu valorisée. On apprend aux jeunes à performer, à réussir individuellement, mais rarement à faire du lien et à s’entraider. Or, ces réflexes sont tout aussi essentiels que les savoirs académiques pour construire une société humaine et résiliente. Pour moi, il ne s’agit pas de « l’enseigner » comme une matière scolaire, mais de la faire vivre. De permettre aux jeunes de ressentir ce que l’entraide apporte : de la joie, du sens, de la fierté. D’expérimenter que donner, c’est aussi recevoir.

Ces jeunes sont l’avenir. Si nous leur donnons les occasions d’intégrer la solidarité dans leur quotidien, par des expériences concrètes, des rencontres, des engagements alors ils grandiront fiers d’être des citoyens engagés, et conscients de leur pouvoir d’entraide. C’est pourquoi d’ailleurs j’ai choisi de m’adresser à eux directement : à travers mes conférences dans les écoles, universités et grandes écoles et une stratégie active sur les réseaux sociaux. Mon ambition est d’infuser la solidarité dans leur parcours, depuis le plus jeune âge, pour qu’elle devienne un réflexe pour eux (qui s’inscrit dans leur hygiène de vie).

Ce film documentaire est à la base un rêve. Je le dis d’ailleurs dans le 1er épisode « je rêverai qu’un jour ça soit à la TV, au cinéma, car ce que font ces associations pour les enfants est une source d’inspiration de dingue ». C’est donc ça l’ADN de ce projet : montrer la solidarité sous un angle positif, vivant, loin de toute approche larmoyante. Je voulais mettre en lumière les associations locales qui agissent auprès des enfants, mais aussi aller plus loin qu’un documentaire vitrine. Chaque épisode explore des dimensions plus profondes, comme les bienfaits du bénévolat ou ce que l’engagement apporte à ceux qui donnent de leur temps, pour inspirer et donner envie aux spectateurs de s’engager à leur tour.

Le 1er épisode s’est construit de manière très spontanée. J’en ai parlé à Coralie Bonnaire, réalisatrice et amie, qui a accepté de me suivre dans cette aventure. J’ai choisi les associations, qui ont dit oui immédiatement, nous avons contacté les hôpitaux, et tout s’est mis en place au fil des échanges. À la fin, j’ai proposé le film à Pathé pour une avant‑première, et ils ont accepté.

Aujourd’hui, la démarche est plus structurée. Nous avons consolidé un budget, et nous pouvons compter sur des partenaires, entreprises, institutions, et même un soutien ministériel, qui nous permettent de pérenniser la production tout en gardant l’esprit d’origine : proximité, sincérité et respect des enfants/familles.

Oui, nous avons l’ambition de poursuivre et d’amplifier la visibilité de cette série documentaire. Le 3ᵉ épisode sera tourné dès la rentrée dans les Hauts‑de‑France, avec des avant‑premières prévues à Lille, Lens, Le Touquet et Dunkerque. Le 4ᵉ suivra début 2026 en région Provence-Alpes-Côte d’Azur (avant‑première à Marseille), avant de poursuivre avec les neuf autres épisodes pour couvrir l’ensemble du territoire national.

Notre vision s’inscrit dans une stratégie de diffusion hybride, à laquelle je crois profondément. Elle s’inspire des évolutions récentes de l’audiovisuel, et notamment de la convergence des médias et des modes de diffusion. Concrètement, il ne s’agit plus de choisir entre cinéma, numérique ou télévision, mais d’imaginer un parcours cohérent qui s’appuie sur les nouveaux usages. En partant du principe que chaque format nourrit de l’autre.

Le cinéma comme vecteur de légitimité où chaque avant‑première régionale est plus qu’une simple projection :

  • elle valorise les associations et leurs bénévoles, avec la même reconnaissance que l’on accorde à des réalisateurs ou des comédiens dans un festival ;
  • elle rassemble citoyens, associations, entreprises et institutions autour d’un événement solidaire, leur permettant d’échanger dans un autre contexte ;
  • elle offre une parenthèse humaine, accessible et positive, qui fait du bien au quotidien (les retours sont unanimes à chaque projection).

YouTube via notre chaine*, pour la jeunesse et la communauté. C’est le média clé pour sensibiliser les jeunes générations. Leur engagement est essentiel pour bâtir une société plus solidaire demain. Comme l’a montré le documentaire Kaizen d’Inoxtag, YouTube permet une relation directe et authentique avec la communauté, générant une mobilisation rapide et massive. En tant que conférencière dans de grandes écoles et universités, je mise déjà sur cette approche pour embarquer la jeunesse dans ce mouvement solidaire local.
La télévision et les plateformes BVoD (France.tv, MyTF1, 6play). Notre ambition est d’ancrer la solidarité dans les habitudes médiatiques grâce à une chronique quotidienne diffusée à la télévision que j’appelle de mes vœux, et simultanément disponible en replay sur leurs plateformes numériques. C’est tout l’intérêt de la convergence : la télévision apporte une visibilité institutionnelle et régulière, tandis que les plateformes numériques élargissent l’audience et s’adaptent aux usages des jeunes. Cette hybridation des formats répond à une tendance de fond et permet de donner à la solidarité une image moderne, accessible et intégrée au quotidien.

En combinant cinéma, YouTube et télévision, j’espère sincèrement que la solidarité locale en faveur des enfants devienne un réflexe sociétal, et non plus un événement exceptionnel comme peuvent l’être les Enfoirés ou le Téléthon.

youtube.com/@AvecEux

Du même auteur...

Mais aussi...

LA RUCHE MEDIA
40 rue des Blancs Manteaux
75004 Paris
Contact
Yasmina Jaafar
Productrice, journaliste, fondatrice du site laruchemedia.com et de la société de production LA RUCHE MEDIA Prod, j'ai une tendresse particulière pour la liberté et l'esprit critique. 

Et puisque la liberté n’est possible que s’il y a accès à l’instruction, il faut du temps, des instants et de la nuance pour accéder à ce savoir.
magnifiercrossmenu linkedin facebook pinterest youtube rss twitter instagram facebook-blank rss-blank linkedin-blank pinterest youtube twitter instagram
Tweetez
Partagez
Partagez