Les réalisateurs Rebecca Fitoussi et Adrien Benoliel racontent l’histoire de la Sécurité Sociale dans le documentaire "Sacrée Sécu, Histoire d'une idole française" diffusé le 18 octobre à 21h et le 19 octobre à 9h sur Public Sénat. Parce que le monde entier nous envie ce système inégalé, il ne fallait pas moins qu'un film pour fêter ses 80 ans ! Symbole fort de notre pays, elle est une fierté nationale qu'il est temps de mieux connaître. C'est chose faite grâce aux 52 minutes qui n'oublient rien de la grande Histoire. Mais combien de temps pouvons-nous compter sur notre "Sécu". Peut-on toucher à cette sacrée idée née après guerre ?
Rencontre avec Rebecca Fitoussi
Rappelez-nous qui sont les créateurs de la Sécurité sociale ?
Comme beaucoup de Français, je ne connaissais pas grand-chose à l’histoire de la Sécurité sociale, j’avais en tête une date : 1945 et un nom : Ambroise Croizat.
Mais en réalisant ce film et en interrogeant les historiens, j’ai découvert que les vrais fondateurs de la Sécurité sociale, ceux qui étaient réellement à l’origine de l’écriture et de l’élaboration des ordonnances de 1945 créant la Sécurité sociale, étaient Pierre Laroque, directeur général des assurances sociales et Alexandre Parodi, ministre du travail entre septembre 1944 et novembre 1945, tous les deux hauts fonctionnaires et résistants. Tous les deux étonnamment tombés dans l’oubli. Contrairement à la légende, ce n’est donc pas le communiste Ambroise Croizat, seul, qui a contribué à la création de ce joyau national.
Avez-vous beaucoup insisté pour convaincre l'acteur Philippe Torreton pour emprunter sa voix ? Une voix que l'on sait engagée.
Non pas du tout, Philippe Torreton a été partant tout de suite pour faire la voix off du film. Il est engagé sur les questions sociales depuis des décennies, passionné d’histoire et il fut un temps où il avait lui-même des propositions pour faire évoluer le système de remboursements de la sécurité sociale et pour rendre pérenne notre modèle, propositions qu’il avait soumises à des responsables politiques qu’il côtoyait lorsqu’il était engagé sur le terrain.
La Sécurité sociale fait à ce point partie de nos vies, qu'on en oublie ses spécificités et son impact. Comment vous est venue l'idée de raconter son histoire ?
C’est l’anniversaire de la Sécurité sociale qui fut notre point de départ. Ce trésor national fête ses 80 ans en octobre 2025 et avec la direction de Public Sénat, nous avons souhaité lui rendre hommage, rappeler ses fondements, ses vertus un peu oubliées parfois. Il s’agissait aussi d’alerter sur l’état de ses finances et donc sur son avenir à moyen voire à court terme. Dans le film François Hollande lui souhaite « l’éternité » mais des économistes nous rappellent à quel point elle est fragile et même en danger. Une Sécurité sociale en danger, c’est tout un modèle français en danger, et avec lui notre accès aux soins, nos retraites, peut-être même ce qu’il reste d’unité et de cohésion dans le pays.
En plein procès Pétain/Laval, comment cette actualité, véritable révolution Copernicienne, arrive à se faire une place auprès des Français ?
Ce qui est drôle et même surprenant, c’est d’ailleurs une des petites révélations du film, c’est que la création de la Sécurité sociale ne fait pas du tout la Une de l’actualité en octobre 1945. Ce système unique au monde que la France vient d’instituer, les journalistes de l’époque ne lui consacrent que quelques lignes en page 3 ou 4 de leur canard. Personne ne prend la mesure de l’événement, les Français sont trop occupés par la reconstruction et pansent les plaies béantes laissées par la guerre.
Quel autre pays possède cette chance sociale ?
La France dispose d’un des systèmes les plus protecteurs au monde en cas de maladie, peut-être même le plus protecteur, qu’il s’agisse de prise en charge financière, de qualité de soins et d’accessibilité. Cela dit, il y a des pays très avancés aussi, notamment la Suède et le Royaume-Uni, a priori plus protecteurs sur le plan financier mais souvent au prix de délais d’attente beaucoup plus longs.